Coup-de-Fouet Bernard du Boucheron Gallimard

Prix éditeur 15.00 euros

Une �pre concurrence entre deux veneurs au fil des battues
se continue sur les champs de bataille contre l�Allemand. Une
cavali�re entre les deux rivaux.

La traque, la guerre, le mariage : trois combats sans merci. Et
autant de volets dans ce deuxi�me roman de Bernard du
Boucheron. Soci�t� de chasse, donc, fid�lement reconstitu�e.
Mais d�s les premiers mots, il faut se porter en fin de volume
pour compulser le glossaire. On n�est pas loin d�une langue
�trang�re. Jargon de la v�nerie, du plus �pais opaque pour les
profanes. On renonce. On s��pargne de laborieux va-et-vient
pour �clairer sa lanterne. Et on y gagne. L�auteur n�usant pas
lui-m�me de d�tours, plut�t avaler les obstacles. Quitte � butiner
dans le lexique apr�s-coup.

Saurait-on se laisser captiver par le r�cit d�une partie de chasse
? En l�occurrence, oui. Il est trac� au cordeau. Et pourrait
confiner parfois au rapport de police, le style en plus. Nous
sommes chez les mondains, en 1911. Diamant Noir, fier
galopeur qui " n�aime pas l�homme ", ce qui nous le rend
sympathique, et " qui ment comme un maquignon ", se
jette assid�ment � la poursuite de grands cerfs, au son de la
trompe et d�une meute aboyante, avec son cavalier, l�hussard
Hugo de Waligny, champion dans sa cat�gorie. J�r�me
Hardouin, alias Coup-de-Fouet, est un piqueur, charg� de pister
l�animal dans les sous-bois, talentueux aussi, accessoirement
p�tri de haine pour le lieutenant qui le lui rend comme il faut et
l��pinglerait bien � son tableau. Entre eux, Aella, " l�effrayante "
Castellblanch, chasse gard�e celle-ci, monte en amazone,
aguiche et a sa langue partout sauf dans sa poche. Le moindre
clignement d��il de la b�te, cheval ou dix-cors, nous est cont�. Il
s�agit aussi de sonner le massacre. L�auteur ne nous fait pas le
coup de l��cologie. Piti� ni pour le gros gibier ni pour les chiens
courants. Pour les humains, n�y comptons pas. La bonne
soci�t�, disions-nous, le verbe est haut. Mais qu�on se rassure,
il faudra peu de temps avant que les biens�ances ne tombent.
On commence par des " Mon cher, il ennuie ", on finit avec
des " Tout Monsieur que tu es, si tu reviens ici, je te tue ! ".
Tout ira de travers. On court le cervid�, on se retrouve face au
loup. Une ellipse plus tard, une biche mangera � l�auge des
chiens et la duchesse dans la main du gueux. Puis c�est
l�ouverture d�une autre chasse : la guerre. " Coup-de-Fouet,
qu�est-ce que tu fabriques ici au lieu d�aller te faire tuer ". Il
ira. Comme mar�chal des logis, toujours au service du m�me
ennemi, Waligny, son sup�rieur, non loin de la fronti�re avec la
Belgique. D�autres �quipages pour d�busquer l�Allemand, � cor
et � cri, mais ce gibier-ci se d�fend � ou plut�t attaque � les
armes � la main. Des initiatives audacieuses seront prises. L�
encore, tout ira � vau-l�eau. La paix revenue, une demande en
mariage comme on n�en fait plus. Vite, l�aversion de l��pouse
pour l��poux. Elle flaire le mensonge, enqu�te sur les pr�tendus
hauts faits d�armes. La vengeance est consomm�e froide. Avant
l�hallali, en fin de battue.

Reste � s�enthousiasmer pour la langue et la veine cors�e.
Quelques mots rendent au mieux l�agonie d�un grand m�le ou
l�effarante cur�e de 14. L��narque Bernard du Boucheron aura
fait carri�re dans l�industrie a�ronautique et on se permettra de
consid�rer que ce fut une perte de temps du point de vue de la
litt�rature. Il aura attendu d��tre fringuant septuag�naire, en
2004, pour publier son premier roman " Court-serpent " �
l�histoire d�un abb� mandat� par sa hi�rarchie pour aller raviver
la foi des peuplades nordiques, � coups de trique et par des
temp�ratures au dessous du minimum � et quelques mois pour
se voir distingu� du Grand prix du roman de l�Acad�mie
fran�aise. Celui qui sort ces jours-ci se hisse sur les m�mes
hauteurs.

Olivier Ngog