#112 - Du 14 octobre au 05 novembre 2008

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Conte de la folie ordinaire

 Asile de fous
R�gis Jauffret
Gallimard
Prix éditeur
16.00 euros

L��tre humain est dou� de parole ; c�est m�me l�une de
ses principales caract�ristiques. Si l�on en doutait encore, R�gis
Jauffret nous le confirme � travers ce roman polyphonique qui
explore diff�rents registres et usages du langage tout en
d�busquant les gros grains de folie plus ou moins tapis en
chacun de nous et de notre entourage.


" Il " est-il le p�re de ses enfants, simplement son mari, ou
encore son amant ? Est-il un riche banquier ou un simple
conducteur d�autobus ? Rien de tout cela et un peu tout en
m�me temps. Difficile d�obtenir le fin mot de l�histoire tant nous
croulons sous la multiplication des affabulations. Celle dont on
apprend ainsi plus tard qu�elle se pr�nomme Gis�le se moque
en effet de tous les �gards dus au lecteur traditionnel, � l�aff�t de
rep�res chronologiques et narratifs clairs. Au fil d�un r�cit en
tension constante entre un pass� en permanence recompos� et
un futur totalement imagin�, elle ne cesse de se d�dire, de
revenir sur ses mots, voire de douter d�elle-m�me, nous menant
ainsi d�un bateau � l�autre avant de passer la barre � une
joyeuse �quip�e. Car � peine a-t-on achev� de tenter de
d�m�ler le vrai du faux dans les dires de la premi�re narratrice
que l�on est abreuv� de ceux d�autres composants de la cellule
familiale, tous aussi aigris, hargneux et seuls les uns que les
autres�
Autant de monologues, de complaintes et de critiques entre
lesquelles les rythmes et les tons varient - adoptant en cela avec
la virtuosit� d�un cam�l�on la personnalit� et le point de vue de
chaque protagoniste � et cependant unis par la constance du
bavardage. Les phobies des uns succ�dent alors aux
fantasmes et aux griefs des autres, au fil d�une intarissable
logorrh�e aliment�e jusqu�� �tourdissement des lecteurs et
�touffement des personnages m�mes.

Une parole de trop ?

Pourquoi un tel malaise face � cette lib�ration de la parole, alors
m�me que l�on d�plore sans cesse le manque de
communication entre des �tres qui ne vivraient plus que par
procuration, soumis au r�gime dictatorial d�images
omnipr�sentes et st�r�otyp�es ? Un tel d�bordement de mots
serait alors salvateur, tel le reflux d�un mutisme accumul� au fil
de nombreuses ann�es de silence� Juste une illusion semble
nous dire R�gis Jauffret : si les hommes parlent, c�est avant tout
� eux-m�mes. Entre monologues et dialogues de sourds, tous
s��coutent parler et se r�v�lent totalement inaptes � l��change.
En t�moignent ces pages enti�res ou les tirets rythment
l��criture, donnant l�illusion d�un dialogue quand bien m�me
qu�un locuteur unique et inchang� accapare le discours. Notre
soci�t� serait donc de fant�mes �go�stes et utilitaristes qui se
c�toient quotidiennement dans le plus grand m�pris. Et le flot de
paroles ne serait qu�un masque visant � combler la
superficialit� et le creux des rapports humains�

L��criture serait-elle alors pr�f�rable, plus utile, plus efficace
que la parole ? La mati�re en est pourtant la m�me, mais les
mots de l��crit, moins spontan�s et plus mall�ables puisque
susceptibles d��tre retravaill�s, permettraient un m�rissement
et une r�flexion plus aboutie. Sinc�re ou pas, l��criture a le
m�rite certain de maintenir une intensit�, et ce jusqu�� la
pirouette finale, qui, au d�tour d�une habile mise en abyme,
nous fait douter de l�authenticit� de la paternit� jauffr�enne de
l��crit m�me que nous tenons entre nos mains. Une v�ritable
histoire de fous. Et de quoi douter de tout. Si tous ces �tres vous
rebutent et que jamais vous ne souhaitez en rencontrer, restez
vigilants. Ils sont peut-�tre bien plus proches que ce que vous
ne souhaiteriez. L�enfer n�est pas toujours chez les autres�
D�autant plus que certains peuvent avoir tendance � adopter une
vision extensive de la famille� � l�issue de cette lecture, toute
ressemblance avec des personnes connues, notamment de
votre univers familial, �tant totalement involontaire, elle est en
effet toutefois hautement probable. Si c�est votre cas, deux
solutions : recourir � une th�rapie de groupe -apr�s tout, les
f�tes de fin d�ann�e procurent un excellent motif de
rassemblement familial - ou bien souscrire au m�me rem�de
que les dames du Femina : lire le dernier Jauffret, et le l�adopter
au propre comme au figur�.

Laurence Bourgeon



 
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