|
|
Mes Hommes
 | | Mes hommes Malika Mokeddem Grasset
     | Prix éditeur 19.00 euros
|
Les auteurs sachant conjuguer un sens aigu de la narration � une langue po�tique sont rares. Heureusement il existe des �crivains comme Malika Mokeddem : en voil� une qui fait jouer les mots comme personne�
De chapitre en chapitre, c�est du p�re � l�amant que l�on passe, du fr�re � l�ami, en passant par l�homme qui n�existe pas encore tout � fait, mais qui pourrait bien surgir tr�s bient�t. Dans l�ensemble des cas, ce sont bien des rapports aux hommes dont il s�agit. Mais pas n�importe lesquels : Mokeddem n��voque pas des hommes � l�ind�fini, ni les hommes en g�n�ral. Il s�agit des siens , et la nuance est � souligner � comme presque chaque mot de ce splendide recueil de moments v�cus. Chaque chose est � sa place, la lecture se fait dans le plaisir de la langue et si l�on s��coutait jusqu�au bout, on s�approprierait bien des passages entiers� On se contentera d�en recopier des bribes, des effluves. A titre d�inspiration.
Dans ce nouvel ouvrage, Malika Mokeddem se fait tour � tour r�volt�e, douce, parfois agressive,puis de nouveau d�une tendresse infinie, mais toujours dans un souci de v�rit� extr�me. Ainsi, les empreintes au lyrisme ne sont jamais utilis�es gratuitement ; la po�sie sert le v�cu, et inversement, dans une rotation qui fonctionne � la perfection.
Mokeddem d�crit ses rencontres successives, d�cortique sa relation de dix-sept ans avec Jean-Louis, ce Fran�ais � qui lui fait la cuisine �, elle explore sans retenue ses liens avec Sa�d, le kabyle aux cheveux blonds... Mais les hommes la renvoient souvent au tout premier. Celui qui pr�f�rait ses fils plut�t que ses filles, dans l�Alg�rie originelle, et qui n�accordait que peu de cr�dit � cette fillette d�voreuse de livres. Mes hommes prend alors toute sa dimension, celle, conflictuelle, que la jeune femme entretient avec son p�re.
Plut�t que de contempler et de creuser un foss� entre les sexes, la jeune Malika se fait tr�s t�t un devoir d�explorer et de se faire curieuse. En un mot, d�agir. Le rapport au corps, � la pudeur et au sexe, les notions de respect entre hommes et femmes qui frisent parfois la condescendance� Dans son d�sert alg�rien natal, Malika �touffe sous le poids des traditions qui ne lui conviennent pas ; aussi d�cr�te-t-elle tr�s vite que les femmes sont elles-m�mes tout � fait misogynes et responsables de la � cruaut� de leurs fils �. De r�flexions en actions, la jeune fille devient femme� mais ne se fera pas r�ellement f�ministe. D�ailleurs, tout est dans le titre� Sa qu�te n�est pas �go�ste : elle cherche seulement � s�approprier les hommes de sa vie, � les faire siens pour cr�er ce rapport intime ou familier dont elle a longtemps manqu�. Quand la catharsis personnelle se fait plaisir de lecture, que demander de plus ? Julien Canaux
| | |