Sade, la terreur dans le boudoir Serge Bramly Grasset

Prix éditeur 19.06 euros

De mars � octobre 1794, alors qu'� Paris la Terreur fait rage, le Marquis de Sade est intern� � la maison "de sant� et de d�tention " de Picpus. Cet homme, �crivain atypique, personnage �nigmatique qui passa pr�s d'un quart de si�cle en prison, qualifiera ce s�jour de "paradis terrestre ". Etrange d�finition quand on sait que de ses autres emprisonnements, il retira une "terrible souffrance ".

Les divers t�moignages sur lesquels s'appuie Serge Bramly tendent effectivement � prouver que Picpus est, � l'�poque, un lieu de d�tention hors norme. Contre esp�ces sonnantes et tr�buchantes, chacun des deux cents d�tenus de M. Coignard peut b�n�ficier d'une relative libert�, assortie de services (mobilier, visites, f�tes), eux aussi rachet�s � prix d'or. Mais Picpus est surtout le moyen d'�loigner pour un temps le spectre de l'insatiable guillotine.

Sortir de l�-bas, c'est la mort assur�e. Tous les d�tenus le savent, Sade comme les autres. Pourtant, durant cette p�riode, il est totalement d�sargent� : qui donc se fait l'avocat du diable pour le maintenir dans ce lieu de d�lices ? Est-ce Sensible, cette jeune femme qui s'est d�finitivement attach�e � ses pas depuis 1790, et qui para�t pr�te � tout pour le garder en vie ? En r�alit�, peu importe au Marquis. A 53 ans, il ne s'int�resse plus qu'� son existence litt�raire, sans toutefois renoncer aux plaisirs charnels qui causeront toujours sa perte.

Construit comme un puzzle, le r�cit superpose habilement t�moignages contemporains, �l�ments fictifs et �pisodes authentiques pour reconstituer le plus vivement possible cette parenth�se de la vie de Sade. Plusieurs voix se m�lent, et de ce ch�ur passionnant se d�gage progressivement une image tout en contraste de cet auteur "irr�ductible", qui n'a plus d'aristocratique que le nom. Grand jouisseur de la Nature, libertin aux actes r�pr�hensibles et condamn�s, il effraie et attire � la fois. Pour lui, vices valent mieux que vertu, plus encore en cette �poque de tourmente politique o� les jours de chacun sont compt�s.

Sans cesse revue au travers du prisme r�volutionnaire, la personnalit� esquiss�e par Bramly laisse r�veur. Si Sade est un des nombreux otages de la Grande Terreur, il n'en sera jamais la victime. Et l'on en vient � se demander quelle horreur est la plus condamnable : la luxure, souvent impie, parfois criminelle d'un homme qui ne cacha jamais la perversit� de ses d�sirs ? Ou bien le torrent de sang vers� par la Veuve, cet instrument d�shumanis� auquel m�me encore aujourd'hui on h�site � conf�rer une l�gitimit� salvatrice ?

Ma�a Gabily