#112 - Du 14 octobre au 05 novembre 2008

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Monsieur Dudron

 Monsieur Dudron
Giorgio de Chirico
La diff�rence
Prix éditeur
15.00 euros

Emblematique, la figure du moine-soldat, reflet de Giorgio de Chirico dans Monsieur Dudron, roman traduit en italien en 1998, vingt ans apr�s la mort du peintre, et qui para�t aujourd'hui pour la premi�re fois dans sa langue originale, le fran�ais. La qualification romanesque ne doit cependant pas induire en erreur quant aux v�ritables intentions de l'auteur. Et le terme � trait�-autobiographie � propos� par Jole de Solana dans l'indispensable postface appara�t plus appropri�.

Du combat esth�tique � la lutte contre la � d�cadence �

Successivement Monsieur Dudron, peintre �ponyme et magnifi�, Isabella Far, son double philosophe ou simplement narrateur complice, la personnalit� de Chirico est omnipr�sente. Ce dernier multiplie les angles de vue - et les angles d'attaque - pour plonger le lecteur au coeur du combat qu'il a choisi de mener, ou plus pr�cis�ment, pour lequel il dit avoir a �t� choisi. L'enjeu en est annonc� d'embl�e : � Les peintres, se disait-il, aujourd'hui et m�me depuis quelques temps d�j�, ne font plus de peinture ; ils ne peignent pas ; ils mettent des couleurs � s�cher sur la toile. Or, une belle peinture n'est jamais de la couleur s�che mais de la mati�re teinte �.

Chirico entreprend ici le proc�s de la peinture contemporaine et, fa�on r�actionnaire, celui de la perte des valeurs morales traditionnelles depuis le milieu du dix-neuvi�me si�cle. Les interventions r�currentes d'Isabella Far servent ainsi de pr�texte � Chirico pour d�noncer avec v�h�mence les causes de cette d�cadence. � cette occasion, les symboles classiques de la modernit� sont convoqu�s et unanimement condamn�s, sans jamais qu'un droit de r�ponse ne leur soit accord�.

Il s'agit tout d'abord de la d�mocratie qui favorise le nivellement des valeurs aristocratiques et exhorte le jugement commun. C'est ensuite la r�volution industrielle qui permet la production de masse et supplante l'artisanat v�ritable h�rit� des ma�tres anciens. C'est le commerce, son prolongement direct, qui appara�t sous la figure honnie du marchand d'art dont Chirico croit bon de pr�ciser la confession juive. Ce sont en fait tous les facteurs qui ont favoris� l'�mergence de la bourgeoisie, classe nouvelle � laquelle il manquait � un sens artistique naturel �. L'�viction des � aristocrates et autres personnages d'�lite, qui, dans le pass�, avaient jou� les arbitres dans les arts � s'est faite au profit de l'intellectualisme, du snobisme, traits distinctifs d'un � public sans culture � qui a pouss� les artistes vers la d�coration.

Face � cette d�cr�pitude de l'art noble, Chirico endosse l'habit d'un peintre id�alis� - Monsieur Dudron - dont l'existence est consacr�e � retrouver ce paradis perdu. Sous la plume de Chirico, la peinture devient un v�ritable sacerdoce qui exige un engagement ardent et total. Cette charge d'essence sup�rieure et quasi-divine s'exerce au coeur de l'atelier, sorte de cellule monacale prot�geant l'artiste des agressions du monde ext�rieur. Violent et inqui�tant, ce dernier prend les traits d'une � Walkyrie � la chevelure ardente � qui enl�ve Monsieur Dudron pour l'entra�ner � une � vitesse folle � au coeur d'un orage nocturne... R�sultat, l'artiste s'isole. L'artiste s'abandonne. L'artiste dort.

De la technique picturale au souffle de l'Inspiration

L'atelier est le th��tre de l'art, de la mise en oeuvre du savoir-faire du peintre. Aux traits rapides et gauches et � la mati�re flasque et visqueuse qui caract�riseraient la peinture contemporaine (abstraite, surr�aliste...), Dudron-Chirico oppose la patiente acquisition des techniques picturales h�rit�es des ma�tres anciens, le lent cheminement du tableau maintes fois arr�t�, observ�, repris... Cette ma�trise technique indispensable ne se suffit toutefois pas � elle-m�me et n'est que le m�dium de la r�v�lation. C'est la r�v�lation - notion-cl� - qui permet � l'artiste d'acc�der � l'essence des choses et donne � son art une dimension m�taphysique. Dans ce but, deux voies semblent ouvertes : celle de la r�verie et du souvenir telle que la pratique Monsieur Dudron, qui fait na�tre de sublimes visions antiques, et celle de la m�ditation philosophique et rationnelle telle que l'incarne Isabella Far.

Loin des -ismes et des chefs de file autoproclam�s, l'artiste v�ritable selon Chirico n'est cependant qu'un r�ceptacle de l'inspiration divine : � un grand artiste est l'�lu au moyen duquel le Talent universel et Divin s'exprime en une forme id�ale mais compr�hensible aux hommes �.

L'intention r�solument pamphl�taire de ce � roman � s'explique sans doute par la violence de l'affrontement bien r�el qui opposa Chirico � certains de ses contemporains, parmi lesquels les surr�alistes et Andr� Breton qui qualifia le peintre de � fasciste �. Le ton parfois acrimonieux et souvent v�h�ment de ce texte emp�che l'adh�sion totale du lecteur � une vision magnifi�e de la � belle peinture �. Mais l'essentiel n'est certainement pas l� : retenons plut�t le t�moignage fervent d'un peintre dont l'oeuvre a marqu� une �tape importante comme l'illustrent les mots de Ren� Magritte � propos du tableau Chanson d'amour (in Histoire de l'art, Phaidon) : � il repr�sentait une rupture compl�te avec les habitudes mentales d'artistes prisonniers du talent, de la virtuosit� et de toutes les petites sp�cialit�s esth�tiques : c'�tait une vision nouvelle �.

Olivier Dumoulin



 
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