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Le Proc�s-verbal JMG Le Cl�zio Folio

Prix éditeur 27.44 euros

Il y avait une petite fois, pendant la canicule, un type qui �tait assis devant une fen�tre ouverte : c'�tait un gar�on d�mesur�, un peu vo�t�, et il s'appelait Adam : Adam Pollo." C'est la premi�re phrase du livre, et c'est � peu pr�s tout.

Mais de cette chaleur �touffante, de cet Adam Pollo, il y a d�j� tant � dire� Suffisamment pour couvrir 18 lettres d'alphabet entre absurdit� po�tique et d�lire existentialiste dans un style luxuriant, tiss� de comparaisons et de contrastes linguistiques aussi incongrus qu'esth�tiques. Sur 18 lettres d'alphabet, on a le temps de d�couvrir que la fen�tre devant laquelle se trouve Adam n'est peut-�tre pas si ouverte que �a. Adam Pollo semble marqu� par la guerre. Il a fait son service.

Adam a fait son service et pourtant il est un D�serteur autant qu'un Etranger. Il a fui les hommes. Il a renonc� � tous, sauf peut-�tre � Michel � qui il emprunte de temps � autre un peu d'argent, � qui il adresse de longues lettres p�tillantes de d�sespoir sautillant. Il s'est r�fugi� dans une maison isol�e, gorg�e de soleil comme une orange bleue et surplombant une mer r�duite � sont �tat g�om�trique de " volume sph�rique, piqu� �a et l� de voiles blanches ". Adam Pollo a choisi la solitude, sans haine, par paresse ou incompr�hension de l'agitation du monde, " il ne voulait plus rien faire qui soit une fatigue ". D�river entre vie animale et existence v�g�tative : c'est la solution d'Adam Pollo parce qu' " on ne vit pas logiquement ", parce qu' " on finit toujours par avoir raison d'attendre la mort ".

Si Adam Pollo a fui la soci�t� c'est pour mieux l'arpenter � la mani�re d'un cl�bard " aux yeux couverts de paupi�res ". Son occupation : il suit le chien dans un oc�an d'incompr�hension, ne parvenant pas compl�tement � devenir mati�re canine et " pas un seul homme ne se [doutant] que le chien n'�tait pas avec Adam, mais que c'�tait Adam qui �tait avec le chien ". Plus tard il se fait rat, non chat. Le voici qui pourchasse un rat blanc aux yeux bleus � coups rageurs de boules de billards.

Adam sombre progressivement dans une chaude folie. Sa ville se peuple de fant�mes insignifiants et l'on divague dans son sillage. Pollo se perd dans son n�ant, dans l'Unicit�, dans l'�ternit�, et son esprit imbib� de d�sespoir se pare progressivement de l'allure de la baudruche qu'est devenu le corps du noy�.

Les vagabondages animaliers d'Adam jusqu'� son p�tage de plomb final dressent le proc�s-verbal d'une humanit� qu'il nous est impossible d'assumer totalement par infantilisme. Parce que l'enfant "pr�f�re se sentir sup�rieur aux plantes, aux animaux et aux trucs et inf�rieur aux hommes, que se sentir l'�gal de qui que ce soit". Adam est un fou. En est-on si s�r que �a ?

Antoine Buéno