Le coeur est un chasseur solitaire Carson Mc Cullers livre de poche

Prix éditeur 8.38 euros

Une petite ville au fin fond des Etats Unis, dans les ann�es 30... La chaleur moite nous monte � la t�te tandis que la monotonie, le racisme et la langueur accablent les habitants...

Carson McCullers a recr�� dans ce roman qu'elle �crivit � l'�ge de vingt trois ans, l'ambiance du sud, et, par dessus tout, la solitude qui lui p�se mais qui constitue le coeur de son existence. Les personnages se croisent, se rencontrent, s'ignorent. Et toujours la lassitude, une profonde r�signation, et cet ennui implacable qui r�gne en ma�tre. Certains personnages se d�tachent pourtant, refusant la passivit� qui caract�rise la plupart de leurs concitoyens. Il y a Jack, r�volutionnaire errant et singuli�rement attachant ; Mick, l'adolescente qui veut consacrer sa jeunesse et son �nergie � la musique tout en refusant ce monde d'adultes d�pourvu d'in�dit, sans joie ni charme ; Copeland, le vieux m�decin noir qui veut lib�rer son peuple de l'oppression blanche accept�e avec une inertie fatale par la communaut� de couleur. Biff le cafetier, obs�d� par le pourquoi de toute chose et de ce qu'il voit ; et John Singer, le sourd-muet qui vivait loin du monde avec son ami Antonapoulos, jusqu'� ce que celui soit intern� dans un h�pital psychiatrique.



Tous croient d�couvrir en Singer cet esprit ouvert seul capable de comprendre la port�e de leur espoir et de leur d�sir. Cruelle ironie du sort, car lui-m�me ne saisit absolument pas ce que tous ces �tres lui veulent et pourquoi ceux-ci semblent vouloir reposer sur lui : "Singer s'�tait retrouv� dans un pays �tranger. Seul. Il avait ouvert les yeux et il avait du mal � d�chiffrer le monde qui l'entourait. Il �tait �berlu�". Obnubil� par une seule source de sensations : le d�sespoir de sa s�paration avec Antonapoulos, le seul homme dont la sagesse et la bont� lui paraissent ind�niables, illusion qui lui permet de supporter sa pi�tre condition...



Dans ce roman cruel, chacun se m�prend sur le compte de l'autre. La certitude qu'il existe une compr�hension mutuelle les emp�che de sombrer. Or il n'y a aucune entente, aucun lien ni aucune connexion possible entre ces �tres. Ainsi, Copeland et Jake sont incapables de se rejoindre ni m�me de s'atteindre l'espace d'un instant, et, au terme d'une discussion, ces derniers finissent an�antis et remplis de haine l'un pour l'autre. La vie est ainsi faite dans cette petite ville des Etats-Unis : chacun est condamn� � rester seul avec ses r�ves de pauvre et ses pauvres esp�rances... La modernit� du th�me et du style fait de ce roman une oeuvre dont on ne peut se d�tacher, refl�tant dans un tout autre temps et un tout autre espace une probl�matique qu'un univers � l'aube du troisi�me mill�naire vit au jour le jour sans pouvoir la quitter des yeux ou s'en relever.

Constance de Ayala