Rencontre avec Serge Joncour

Interviews
Comment qualifieriez-vous votre livre ? Roman, recueil, bidule... ?

Répertoire. Je le qualifierais de répertoire. C'était d'ailleurs le titre d'origine : " répertoire des situations délicates ".

Pourquoi constituer ce répertoire ?

Je voulais décrire des situations anodines qui n'ont rien de particulier, mais qui deviennent spectaculaires lorsque la gêne les envahit. Il y a quelque chose de spectaculaire dans l'anecdotique. Mais mon intention était surtout le partage. Un jour, j'étais dans un restaurant et mon téléphone a sonné. Tout le monde regardait à droite, à gauche, pour chercher le coupable, et comme j'étais gêné, j'ai fait la même chose. Ce genre d'histoire est arrivé à tout le monde, et quand je l'ai réalisé, ça m'a vraiment... déculpabilisé.

Qu'évoque pour vous ce mot dont on nous rabâche les oreilles : l'intime ?

C'est un mot qui désigne mon travail, pour ce livre. Ce n'est pas une trajectoire. C'est assez surprenant de voir combien les gens ont envie de parler d'eux, des chose anodines qui leur arrivent. On le voit à la télé par exemple. Il y a une sorte de curiosité, de voyeurisme, de désir de connaissance. Je voulais toucher des choses que l'on partage tous. Je le vois très bien dans la réaction des gens : avant, pour mes autres romans, on me formulait des jugements esthétiques. Avec Situations délicates, les gens viennent spontanément me parler de leurs propres situations de gêne. Au début, j'avais prévu d'envoyer ce manuscrit aux éditeurs avec l'annotation : " pour une fois, le livre parlera de vous ".

Et l'humour ?

C'est le seul échappatoire viable que j'ai trouvé. A moins de balancer dans la violence. Ca permet de dédramatiser, de trouver une connivence avec le lecteur. En fait, c'est autant un parti pris littéraire qu'un parti pris personnel. Avant d'être publié, je faisais lire quelques textes à des proches, et je pouvais sentir que ça les faisait marrer. J'imagine que c'était aussi une façon de me rassurer et de donner une légitimité à mon désir de devenir écrivain.

Vous venez des éditions Le Dilettante, et comme beaucoup d'écrivains vous vous retrouvez chez Flammarion. Comment expliquer cet itinéraire ?

Oui, c'est vrai que certains écrivains ont eu le même parcours. Ravalec, Holder... En fait, Dominique (au Dilettante) a un vrai talent de " découvreur ". C'est une qualité rare pour un éditeur. Je me souviens qu'il disait souvent : " je vais lever les filets du pêcheur ", le matin lorsque le courrier arrivait. C'est un pêcheur. Chez Flammarion, j'ai trouvé une dimension affective importante pour moi. Un suivi des attachées de presse. Une structure peut-être plus adaptée.

Est-ce qu'il existe des passerelles entre les deux maisons d'édition ?

Pas vraiment. Il y a quelque chose avec la distribution. Mais pas de vraies passerelles.

Vous avez été maître nageur, livreurs de journaux, portier de bar de nuit, cuisinier, vous êtes maintenant écrivain. Des projets pour l'avenir ?

Je suis en train de finir un roman. Un roman qui sera émouvant. Très émouvant. Qui n'aura rien à voir avec Situations Délicates...



Florian Zeller


Serge Joncour
Ed.
0 p / 0 €
ISBN:
Last modified onjeudi, 23 avril 2009 23:07 Read 3807 times