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Jean Cocteau et le sexe des anges



Difficile d��chapper � Jean Cocteau en cette rentr�e 2003. Une exposition �v�nement � Beaubourg, une flop�e de biographies, parmi lesquelles on distinguera la somme de Claude Arnaud chez Gallimard, de nombreuses r��ditions de certaines de ses oeuvres jusqu�alors introuvables... Tout cela ressemble furieusement � un rouleau compresseur marketing, et ce d�autant plus que la raison invoqu�e pour ce d�ferlement est plut�t light (quaranti�me anniversaire de sa disparition) et qu�il fait suite - et pr�c�de probablement - de nombreuses op�rations similaires pour � peu pr�s tout ce que la litt�rature fran�aise compte de noms prestigieux. Une seule condition : �tre mort, tant il est vrai qu�un auteur mort est moins regardant, avouons-le, sur le devenir de son oeuvre qu�un auteur contemporain exer�ant encore son droit moral. On attend avec impatience le 200e anniversaire de la Bar-Mitsva de Chateaubriand et la c�l�bration de la perte du pucelage de Nathalie Sarraute.

Dans le cas de Cocteau cependant, cette red�couverte semble n�cessaire tant l�homme et son oeuvre sont complexes et contradictoires. Dessinateur, po�te, mondain, cin�aste, sc�nariste, auteur dramatique, les incarnations successives et souvent simultan�es de ce cr�ateur prot�iforme ont d�rout� ses contemporains et brouill� son image, au point qu�on ne retient parfois de Cocteau que le souvenir �dulcor� d�un dandy � l�aspect souffreteux qui a r�alis� ce vieux film avec un Jean Marais couvert de poils que l�on rediffuse en fin d�ann�e. Cette �tiquette d�esth�te �mascul� �pris d�un romantisme flamboyant emp�che de voir clairement le caract�re furieusement sulfureux de Cocteau tout au long de sa vie. Au profit de cette confortable image d�Epinal de vieux monsieur distingu�, on passe sous silence le fait que son homosexualit� lui a valu d��tre stigmatis� avec une violence inou�e. On oublie que Paul Eluard a r�ussi � faire interrompre la premi�re de La voix humaine en hurlant des insanit�s � l�encontre de celui qu�il consid�rait comme un ignoble sodomite. On occulte les chansonniers qui ont tra�n� dans la boue ses amours au masculin pendant des d�cennies. Le cas de ses dessins homo-�rotiques est embl�matique du m�canisme insidieux qui a transform� un homme profond�ment libre en po�te ch�tr�. Longtemps invisibles, ils d�multiplient � l�infini l��ph�be classique tel que Cocteau le fantasmait : cheveux boucl�s de p�tre grec et profil syst�matique orn� de la fameuse petite �toile. Assez pour agacer ceux qui consid�rent le Cocteau graphiste comme monotone. Assez pour conforter dans leur vision romantico-niaise ceux qui refusent d�y voir autre chose. Et pourtant, si l�on oublie ces d�tails relevant bien plus de la signature que du manifeste, force est de reconna�tre le c�t� franchement sexuel - quasi hardcore - de ces illustrations o� de jeunes hommes � la musculature �l�gante et aux traits d�licats sont dot�s de sexes �normes, aussi larges que longs, exhibant leur �rection monstrueuse en �cartant largement les jambes. Quand ils ne pr�f�rent pas d�voiler de fa�on explicite leur c�t� face et leurs fesses outrageusement rebondies.

On est bien loin du vieux po�te officiel un peu raseur que l�on essaye � toute force de nous fourguer depuis quarante ans, et l�on d�couvre un homme raffin�, certes, mais plus proche par l�esprit et le trait de Tom of Finland et Guillaume Dustan que du quai Conti. De ce retour sous les feux de l�actualit�, retenons la fin d\'une illusion. Offrons-nous l�occasion de rejeter l�image bourgeoise, unidimensionnelle et dramatiquement lacunaire de l�acad�micien ami du tout-Paris au profit d�une vision plus juste qui int�gre enfin l�opiomane amateur de beaux gar�ons muscl�s. Non par voyeurisme, mais par honn�tet� intellectuelle, ses pulsions �tant, autant que son go�t pour le lyrisme, la mati�re m�me avec laquelle il fa�onna son oeuvre.

Cocteau aimait, en parfait animal de salon, les r�parties fulgurantes. Il a lui-m�me, dans un bon mot rest� c�l�bre, expliqu� tout ce qu�il y avait � comprendre � son sujet. Lors d�un d�ner, un convive s��tonnait du silence soudain qui r�gnait autour de la table. Sans doute impressionn� par la proximit� du po�te, le malheureux hasarda un � Un ange passe � un peu court auquel Cocteau r�pliqua sans sourciller � Qu�on l�encule �. Tout �tait dit. Il est temps de d�boulonner cette statue impavide du pi�destal sur lequel on l�a trop t�t juch�e. Cet homme � l\'id�e tr�s pr�cise du sexe des anges serait le premier � s�en r�jouir.


Plus sur Cocteau :

- Jean Cocteau, sur le fil du si�cle, au centre Pompidou du 29 septembre 2003 au 05 janvier 2004
- �dition anniversaire de Jean Cocteau, Ed. du Rocher
- Le cordon ombilical de Jean Cocteau, Allia
- Cocteau de Francis Steegmuller, Ed. Buchet-Chastel
- Jean Cocteau sur le fil de Fran�ois Nemer, � D�couvertes � Gallimard-Centre Pompidou


J�r�me Farssac

 
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