Les Brèves

Nouvelles du Goncourt: Bernard Comment lauréat 2011
Nouvelles du Goncourt: Bernard Comment lauréat 2011
Tout passe de Bernard Comment (Christian Bourgois éditeur) a obtenu le Goncourt de la nouvelle. L'accadémie ...

Le parfum des livres
Le parfum des livres
A l'heure où le débat sur le numérique envahit et affole le milieu de l'édition, le bibiophile - ...

Harry Potter, nouveau Satan?
Harry Potter, nouveau Satan?
  Le diocèse catholique de Gliwice, en Pologne, a mis en garde ses fidèles contre la lecture ...

Un prix pas si discret
Un prix pas si discret
La France compterait autant de prix littéraires que de jours de l'année, de villes ou de cours d'eau, ...

PPDA : des ventes plagiées ?
  PPDA aussi bien que Hemingway ? Les chiffres des ventes de Hemingway, la vie jusqu’à l’excès ...

George Bush auteur de "crime novels"?
George Bush auteur de
Déplacer les volumes des mémoires de George Bush récemment parus dans la section "crime fiction" ...

palmarès des prix de saison
palmarès des prix de saison
Ainsi soient-ils. Les jurys des prix littéraires 2010 se sont (presque tous) prononcés et les lauréats ...

Un pont pour le Medicis
Un pont pour le Medicis
C'est au tour du jury du prix Medicis de mettre au jour son palmarès de l'année 2010. A savoir: Maïlys ...

06

Déc

2007

Le mystère de la chambre 204
Écrit par Laurence Bourgeon   
On raconte qu’à Palerme, au début du siècle, un baron a vécu reclus dans la chambre du Grand Hôtel et des Palmes. Sous le poids d’une vendetta fatale, il passait rarement le seuil de la 204. Rares étaient ceux qui l’ont croisé. Au point que certains doutent de son existence réelle. Réalité ou légende ?

Certains lieux sont mythiques. Ils peuvent avoir été le cadre de l’accomplissement d’un événement historique majeur, accueillir quelque vestige architectural ou bien encore avoir été marqué par le passage d’une célébrité ou d’un être hors du commun. Dans le cas du Grand hôtel et des palmes, on se rapproche de cette dernière tendance. Mais outre les escales régulières du show-biz mondial en vadrouille ou en tournage, un atout atypique rajoute au charme et à l’attrait du lieu. Un certain baron y serait descendu un soir quelque part entre ses 20 et 25 ans pour n’en plus jamais ressortir, à l’exception du 2 novembre, le jour de la fête des morts.
Si passer sa vie dans le lit d’un palace peut s’apparenter au paradis pour certains, elle équivaut plutôt à une condamnation pour ce baron. Car si la Sicile est la terre du Guépard, elle est aussi celle de nombreux parrains et le baron, directement issu d’une de ces lignées mafieuses, n’est pas resté étranger aux pratiques de ses aînés : lors d’une rixe qui a dégénéré, il a battu à mort un jeune homme d’un autre clan. Un affront qui ne peut rester impuni. Or, dans ses milieux là, on se rend justice soi-même. Afin d’éviter l’issue fatale qui le menace en rétorsion, il s’octroie une dernière liberté : choisir lui-même sa peine et l’endroit où il la purgera. Ce sera Palerme. Les liens du sang et de la terre étant les seuls qui le rattachent encore au monde, il ne peut consentir à quitter sa Sicile natale . Quant à la teinte de sa prison, il la choisira dorée. Son nom : le Grand Hôtel et des Palmes. Et le numéro de son matricule : 204, celui de sa chambre.

Le prix de la liberté

Comble de la liberté ou perpétuité recluse ? Passé un temps d’enfermement radical nourri par une paranoïa lui faisant percevoir la tête et le pas de son ennemi derrière chaque porte, le baron se bâtit un chez-soi plutôt confortable, propice à la réflexion, à la lecture et au jardinage (il cultive une plantation de citronniers sur son balcon). Tout laisser-aller est néanmoins banni. Puisqu’il a réussi à sauver sa peau, autant en prendre soin. Le barbier de confiance demeure d’ailleurs longtemps la seule personne autorisée à passer le seuil de la 204. Jusqu’au jour où le baron ose s’aventurer au restaurant et côtoyer le monde, à défaut de le fréquenter réellement.
Car à vivre reclus, le temps s’étire, se dilate, au risque que toute notion du réel disparaisse. Le baron s’y reconnecte par intermittence, au gré de l’actualité des célébrités qui les amène à investir l’hôtel, mais souvent à distance… De Luigi Pirandello à Al Pacino en passant par Michel Leiris ou encore de touchants anonymes, les rencontres ont été légion. Mais de récidive, aucune. Jusqu’à ce qu’un jour, il croise une femme avec un air d’Ava Gardner qui va bouleverser sa vie.

Pour celui qui, aux yeux du plus grand nombre, n’est qu’un fantôme, rien de plus naturel qu’il ne s’entiche d’un fantasme. Celle-ci semble bien réelle pourtant. Mais suffira-t-elle à agrémenter sa vie au point de lui permettre de faire de vieux os heureux ? Car à quoi bon s’agripper à la vie si c’est pour l’édulcorer ? Dans sa chambre de luxe, le baron est certes sain et sauf, mais pas à l’abri de l’oubli et pas suffisamment misanthrope pour apprécier totalement son statut d’ermite. Tel est le dilemme auquel Philippe Fusaro confronte son personnage, sans jamais le juger pourtant. Quelles que soient les atrocités qu’il a pu commettre en premier lieu – qui demeurent très floues - , il parvient à nous attacher profondément à cet homme dont la force n’est qu’apparente. Il élabore un récit original et touchant qui, l’air de rien, pointe les questionnements qui habitent le plus modeste des humains : le poids du temps, le rapport au monde et aux autres ou encore l’importance du patronyme qui ne se fait jamais autant sentir que lorsque sa mention en devient proscrite.
Oscillant entre la lecture des états d’âme de cet homme sans âge et les observations des rares personnes qui l’ont rencontré, l’on suit ce parcours à plusieurs voix. Une construction on ne eut plus adéquate pour un homme dont l’essence même est la rumeur et le « on-dit ». Etre ou ne pas être, telle est bien l’éternelle question.

Laurence Bourgeon

Palermo solo
Philippe Fusaro
Ed. La Fosse aux ours
188 p / 17 €
ISBN: 9782912042









Articles les plus récents :
Articles les plus anciens :

 
Joomla SEF URLs by Artio

News

Nos dernières interviews

Who's Online?

Nous avons 14 invités en ligne