Virginie Despentes
Virginie Despentes (c) Jean-François Paga / Grasset

Despentes ascendante

Chroniques

Retour en fanfare dans le paysage littéraire français de la lesbienne de choc Virginie Despentes avec la publication de Vernon Subutex 1 & 2. Portrait façon punk de l’enfant terrible.

Les romans de Virginie Despentes ont une demi-vie longue. Depuis la déflagration Baise-moi en 1993, également adapté au cinéma par Coralie Trinh-Thi, le rythme de ses parutions s’est subrepticement ralenti. À tel point qu’on avait failli l’oublier depuis la parution d’Apocalypse bébé en 2010 qui, elle-même, avait rompu six ans de silence après la sortie de Bye Bye Blondie. Fidèle à Grasset depuis 1998, la parolière-traductrice-réalisatrice a réussi à imposer son style éraillé et brut de décoffrage. Et a même réussi l’exploit de le faire reconnaître aux plus hautes instances germanopratines, puisqu’elle a décroché l’avant-gardiste prix de Flore dès 1998 avec son troisième roman Les Jolies Choses et le plus classique prix Renaudot en 2010 avec le manifeste Apocalypse bébé.

Descente aux enfers

La sortie, gonflée, de son dernier roman en deux parties Vernon Subutex début 2015 a mis un grand coup de pied dans la fourmilière d’une rentrée de janvier, qu’elle a dominée avec – évidemment – Soumission de Michel Houellebecq. Le second volume des « aventures » de Vernon, pas encore sorti à l’heure où nous écrivons ces lignes, reprendra l’histoire là où le premier volume l’avait laissé… si toutefois Virginie Despentes finit par rendre son manuscrit, ce qu’elle n’avait toujours pas fait mi-mars à écouter son éditeur désemparé, alors que la sortie était initialement prévue le 6 mai. Une date qui ne sera pas tenue.

Flaubert dans le RER

Pour le premier tome, voici l’histoire : Alex Bleach, un chanteur rock, est retrouvé mort dans sa baignoire. Overdose, cela va de soi. Là où le bât blesse pour son ami Vernon Subutex, disquaire de son état, c’est que ledit Alex l’aidait à régler son loyer et que, ne pouvant pas payer, il est expulsé de son appartement. De surcroît, Vernon se retrouve en possession d’une vidéo compromettante de son ami. Un pitch qui sent bon la série B et les rebondissements en série. Ce rapide résumé n’est évidemment que le début de ce que les médias ont décrit comme une « comédie humaine » des bas-fonds, qui restitue ce que Virginie Despentes sait faire de mieux : un « parler-écrit » incisif et beaucoup plus affûté intellectuellement que ce que ces raccourcis pourront laisser penser. La dame Despentes, deux décennies de littérature et de militantisme au compteur, a en effet plus d’une théorie dans son sac pour « vertébrer » un récit qui, autrement, pourrait n’être qu’un polar trash sans âme ni contenu. Laissez-vous donc entraîner par Despentes, en toute confiance.

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