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Antoine Bello
Antoine Bello DR

Antoine Bello, l’ami américain

Chroniques

Sarkozyste de la première heure, entrepreneur et binational, Antoine Bello est un animal étrange parmi la faune des écrivains qui fréquentent la collection blanche de Gallimard. Raison de plus pour vous le présenter.

Antoine Bello a tout d’une chimère. Pour commencer, cet auteur (six romans et deux recueils de nouvelles) ne vit pas de sa plume. Et pour cause, c’est un entrepreneur qui a fondé, entre autres, la société Ubiqus, spécialisée dans le compte rendu de réunions. Une prose bien éloignée du romanesque qui l’a pourtant inspiré pour son œuvre majeure, Les Falsificateurs et sa suite – un poil moins réussie – , Les Éclaireurs. Le premier volet paru en 2007 pourrait être sous-titré « Au bonheur des paranos ». La trame est simple l’ascension d’un jeune Islandais, Sliv Dartunghuver, au sein du CFR, le Consortium de falsification du réel. Le CFR est chargé tout simplement de réécrire l’histoire et de poursuivre de mystérieuses finalités, dont la révélation fait tout le sel de ce diptyque clos par Les Éclaireurs, paru deux ans plus tard. Bello fait preuve dans ce(s) roman(s) d’un talent de conteur exceptionnel, qui vous fera douter des manuels d’histoire. Chez Bello, cette écriture blanche, très américaine, se met au service d’histoires finement ciselées et de thèmes contemporains toujours singulièrement pertinents.

Descendant illustre

Qui aurait cru que le monde de l’assurance-vie pourrait fournir une bonne matière romanesque ? C’est pourtant le cas avec Roman américain. Antoine Bello réserve une autre surprise : celle d’être le petit-fils de Marcel Aymé ! Son don pour le récit serait-il un atavisme ? En tout cas, la variété des thèmes abordés au fil de ses romans – les compétitions de puzzle, le football… – ne laisse aucun doute sur son talent et sa capacité à se renouveler à chaque opus... Reste à comprendre les raisons qui l'ont écarté des listes de best-sellers depuis la publication des Funambules, en 1996. Un mystère à sa hauteur qui ne sera surement pas résolu par la sortie de Roman américain. Pourtant tout aussi virtuose de distrayant que ces prédecesseurs, son dernier opus est trop intelligent, pas assez lounge. Pensez un peu : si, en ouvrant ce livre, vous n’êtes pas familiarisé avec le life settlement – la revente de polices d’assurance-vie – et tout le jeu de bascules économiques qui l’entoure, il y a fort à parier que cela sera le cas quand vous l’aurez refermé. Les échanges épistolaires entre deux vieux amis de fac de lettres – Vlad Eisinger et Dan Siver –, séparés par le succès de l’un et l’insuccès de l’autre, sous-tendent un récit brillant et étonnamment distrayant sur, pêle-mêle, le grand roman américain, la vie, la mort et leurs intérêts financiers.

Roman américain,
Antoine Bello,
Gallimard,
288 p., 18,50 €.

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