Tribus modernes J�r�me Baccelli Editions du Rocher

Prix éditeur 15.00 euros

Tel un conteur des temps modernes, mais qui regretterait les temps anciens, J�r�me Baccelli r�ussit, dans son premier roman, � r�unir po�sie et esprit critique. Tribus modernes, ou la fusion des genres au service de l�humanit�...

Construit comme une mont�e obs�dante, ou une sorte d�ascension � dans l�attente d�un paroxysme�, Tribus modernes est de ces romans qui vont r�ellement quelque part, qui ne laissent pas indiff�rents. On est loin des �uvres �crites au fil de la plume, o� les digressions sont l�gion, et o� la moindre id�e facile en appelle forc�ment une autre... Ici, il n�y a jamais un mot de trop. Chaque paragraphe est savamment ma�tris�, assum�, et on devine un canevas fort bien r�d�. Les paragraphes sont courts, ils s�encha�nent presque implacablement, et on les comparerait presque � des coups de poing frapp�s sur la table... En r�alit�, et on devine bien que telle �tait sa volont�, J�r�me Baccelli nous propose une vraie r�flexion, d�pourvue de codes et de sous-entendus.Son combat ? Celui du d�senchantement, du � tout �a pour rien �, de la non-reconnaissance du pass� et du travail de nos anc�tres, des technologies modernes d�shumanisantes, de notre soci�t� surinform�e, de nos comportements irresponsables, des int�grismes de toutes sortes... On pourrait continuer ainsi longtemps. Toujours intelligent, le propos de notre auteur nous conduit dans des couloirs o� il fait bon, parfois, se balader : car si les tribus anciennes marchaient pour conqu�rir des petits riens, nos tribus modernes marcheraient, elles, vers de vastes n�importe quoi...

Et ils march�rent...

En s�attachant � la notion de tribu, et en gardant une narration toujours externe, Baccelli permet ainsi � son roman de ne jamais s�ancrer dans le r�el, et de garder une � vue de haut �, tel un �il sup�rieur. Pour r�cup�rer une image moderne, on pourrait �voquer la Voix de Big Brother, qui s�infiltre l� o� on l�attend le moins... "Ici la voix" : un murmure pour nous dire la v�rit�, pour rappeler les faits. Et surtout nos actes.Mais cette distanciation ne se fait pas sans heurts. Au d�triment d�une certaine l�g�ret�, peut-�tre, qui aurait conf�r� au roman une sorte de souplesse, de fluidit�, Baccelli utilise sciemment � mais sans religiosit� aucune � un ton biblique qui fait tout le style de ce moment de lecture. En tant que spectateur, on se sent guid� par une voix venue d�ailleurs, qui nous conte les p�ch�s et les p�r�grinations des hommes... Les exc�s des � Ouestiens �, et du monde occidental tout entier, se voient pass�s au crible. Mais cette Voix... Cette voix d�passe-t-elle seulement l�incantation, et le simple constat de notre modernit� ?

Julien Canaux