Se r�soudre aux adieux Philippe Besson Julliard

Apr�s l'accueil mitig� de son roman sur l'affaire Gr�gory, L'enfant d'octobre, c'est avec plaisir que nous retrouvons le prodige du chagrin � la plume �l�gante, fine et sensible.

Louise aime Cl�ment qui ne l'aime plus. Cl�ment a choisi de rester avec sa compagne officielle, laissant Louise sur le bas-c�t� de sa vie. Histoire banale, d�nouement presque fatal. Voici ce que raconte le dernier roman de Philippe Besson dans une longue lettre d'amour de 188 pages o� sont invoqu�es douleur et douceur, violence et langueur. Louise se rem�more, observe son histoire pass�e du bout du monde. Entre la souffrance et le vide, elle se souvient de ses attentes incessantes, de cet homme qui la rendait ma�tresse alors qu'elle voulait faire partie de sa vie quotidienne.

C'est une rengaine, un refrain. On aime et puis on aime plus. C'est Musset: "On est souvent tromp� en amour, souvent bless� et souvent malheureux; mais on aime". C�est Jakie Quartz: "Bon c'est l'heure o� les souvenirs se ram�nent� On revoit les d�buts et on conna�t la fin� Puis de toute fa�on, la mort d'un amour donne la vie � un autre. Y a d�j� moins de soucis � se faire�".
Tout a �t� dit sans doute. Mais n�est ce pas seulement cela, le propre de la litt�rature ? Nous conter notre propre vie et nos �motions sous couvert d�universel ? Louise �crit comme elle pleure. Avec une fougue qui n�appartient qu�aux femmes malheureuses et amoureuses et que Besson rev�t comme un costume sur mesure. Elle raconte � cet homme son p�riple hors de lui, loin de leur histoire, dans des lieux qui ne lui rappellent rien. La Havane, New York, Venise, l'Orient-Express et m�me Paris : nous voyageons avec elle entre ces destinations en arri�re-plan et des souvenirs � la place pro�minente.

Ecrire plut�t que rien

Se r�soudre aux adieux est un roman d�amour, une histoire classique sublim�e par les mots malax�s et choisis avec soin par un auteur-po�te. Comment un homme peut-il se glisser � ce point derri�re les paupi�res d�une femme, entre ses larmes et ses espoirs vains ? Dans le langage de Besson �crire rime avec tristesse. Il faut �crire les �tats de l��me pour ne pas tomber plus bas. Mais, alors qu�il laisse souvent la tristesse envahir ses �crits, Besson nous offre ici une ouverture sur la reconstruction ce qui fait de ce roman, un roman d�amour optimiste. "J'�cris pour ne pas �tre tout � fait morte, parce que le mouvement de la main est au moins un mouvement".
C�est l�acte m�me d��crire qui la rend � la vie et lui donne le courage absolu de se r�soudre � ces fameux adieux. Au fil des pages, elle avouera � Cl�ment que c�est pour elle et elle seule qu�elle �crit. Cet aveu lui rouvre les paupi�res,d�licatement et lui annonce la possibilit� d�une gu�rison.
En choisissant la forme �pistolaire, Besson sublime ce travail du deuil et fait de l��criture le personnage principal au m�me titre que Louise. Par sa plume lyrique et dense, sensiblement f�minine, il d�voile les vertus et la force de l��criture et nous sert une belle le�on de courage.

Olivia Michel