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01

Fév

2010

Anti cléricale Imprimer
Écrit par Laurent Simon   
Avec l'histoire über outrée d'Olimpia Maidalchini, Céline Minard noue un pacte moyenageux avec les esprits qui l'habitent : imprécations, cris, fontaine ordurière... l'exorcisme n'est pas loin. Céline Minard est une exception. Son troisième roman, Le Dernier Monde – et non Le Dernier Homme comme on l’a souvent lu – traitait de l’histoire hallucinée du seul être humain restant sur Terre, rescapé d’une apocalypse qui ne disait pas son nom : invraisemblable. Dans le suivant, Bastard Battle, l’auteure abordait avec un surréaliste brio l’histoire de Denysot-le-Clerc dit le Hâchis dit Spencer Five, dans un récit moyenâgeux abâtardi d’argot en vieux françois mais aussi de chinois, de code samouraï ou manga : improbable. À bien y réfléchir, son premier opus, R, avait déjà posé les bases de ce style diablement outrancier et surcultivé. Cette ancienne étudiante en philosophie défroquée a réussi l’exploit de transformer un objet de réflexion pure – la monade de Leibniz, pour les connaisseurs – en un sujet romanesque. La Monadologie est ainsi un des rares objets littéraires non identifiés à avoir traversé le ciel de l’édition ces dernières années : une science-fiction spéculative, faisant voyager ses deux héros dans des mondes physiques et métaphysiques, coincés entre Isaac Asimov pour la trame et… le grand nulle part pour tout le reste. La Monadologie défiait les comparaisons. Ni pop ni élitiste, le style Minard est un univers parallèle et homogène, toujours un poil uchronique.

Quand la papesse bulle

Pour son petit dernier, Olimpia, elle suit le filon séculaire pour raconter l’histoire d’Olimpia Maidalchini, égérie du pape Innocent X au XVIIe siècle. Ce portrait de la « grande prostituée », comme elle était surnommée à l’époque, est à des années-lumière du roman historique bon teint, façon Decaux ou Druon. Pourtant, pour la première fois, la papesse Minard "bulle" un peu : stylée comme jamais, le récit d'Olimpia se comporte comme de l'amadou : à peine allumé, déjà consumé. En deux heures à peine, c'est plié. Basta les intrigues de cour, à bas les rebellions d'un clergé pourri : le lecteur n'aura droit qu'aux imprécations folles de la papesse. L'histoire d'Olimpia Maidalchini est passionnante mais comment diable ne peut-on pondre que 92 pages avec une telle somme d'intrigues à disposition ? Conçu en villégiature à la Villa Médicis, Olimpia ressemble à une dissertation magnifiquement bâclée par une élève surdouée. Olimpia Maidalchini, belle soeur du pape Innocent X, tint sous sa coupe obsessionnelle tout le clergé catholique de 1644 à 1655. Onze ans d'une régence hors normes, complètement contre nature. Avec un tel joyau narratif, paradoxalement très peu traité par les artistes et les écrivains de tous poils, Céline Minard aurait pu non seulement écrire le meilleur livre de la rentrée mais aussi accomplir son chef-d'oeuvre. Dommage.

Olimpia
Céline Minard
Ed. Denoel
92 p . - 10 euros










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