Il y a ceux qui écrivent l’Histoire et ceux qui la font. François Bégaudeau remet les pendules à l’heure et les hommes à leur place…
« Un homme et une femme sont dans une cave, les deux sont battus qui pleure ? L’homme. Ceci est un fait ». Ce n’est en rien un blague, c’est de la provocation sarcastique. Sur un sujet brûlant d’actualité : la captivité de Florence Aubenas, François Bégaudeau monte au créneau. Le 14 juin 2005, cette dernière donne une conférence de presse publique retransmise à la télévision. Il prend donc pour matière son discours. Il le retranscrit par morceaux et le commente. Les propos tenus par la journaliste lui servent de socle pour ouvrir une fenêtre sur le monde et sur le rebord de laquelle il pose sa longue vue.
Fin de l’histoire n’est pas un roman, ni vraiment un essai non plus. Il tient plus de l’éditorial travaillé sur le plan formel. Des convictions, François Bégaudeau n’en manque pas. Il tire sa mitraillette de sarcasmes sur les absurdités du présent. Première visée, notre société du spectacle et son américanisation. Aujourd’hui, tout est show. Il faut de la mise en scène. Surtout à la télévision. Florence Aubenas raconte son histoire fait après fait. François Bégaudeau démontre et démonte les réactions de l’audience. Interprétations, surinterprétations, surenchères. « Il ne s’agit pas d’entretenir des zones d’ombre », précise t-elle. Pourtant « ils chercheront entre les lignes, débusqueront les manques, relèveront les anomalies ». Eux les politologues, le spécialiste de diplomatie moyen-orientale, le psychologue normatif. « Ces traqueurs de pire ne veulent pas voir la montagne de vie sur quoi bute leur science vaudou ». L’Histoire rate le présent des faits immédiats. D’ailleurs elle n’est plus : fin de l’histoire. Celle, « sexuelle, qui partage l’humanité en deux groupes assignés à des fonctions : les hommes catapultent les maisons, les femmes tiennent la baraque ». « Un homme et une femme sont dans une cave, les deux sont battus qui pleure ?... ". Victoire de l’émancipation.
Oui, Les hommes sont monstrueux et accomplissent des actes barbares. A contrario, les femmes sont exemplaires et formidables et exceptionnelles et fortes et douées d’une capacité d’abnégation. Ce n’est sûrement pas cette dichotomie basique que François Bégaudeau a voulu laisser transparaître. Mais son texte, à cheval entre analyse du discours, essai et éditorial polémique tombe parfois dans l’exagération. Bien que volontaire et recherchée, elle affaiblit le raisonnement et frôle le pathos. Ce mélange des genres rondement menée est incisif et percutent. Il confirme que François Bégaudeau est un écrivain de talent.
Doreen Bodin
Fin de l'histoire
François Bégaudeau
Ed. Verticales
135 p / 12 €
ISBN: 207078472
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