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14

Jui

2007

Stratosphérique
Écrit par Laurent Simon   
David Mitchell a 38 ans, il vit en Irlande avec sa femme et ses deux enfants. Il est écrivain. Particularité : produit des chefs d’œuvres.

Quand les écrivains tricotent des fils narratifs, le résultat ressemble plus d’habitude à des cordes à nœuds qu'à de la dentelle du Puy. Pas David Mitchell. Les entrelacs sont apparemment une de ses spécialités. Mieux, sous sa plume, elles deviennent un manifeste esthétique. Il porte à la perfection cet art du storytelling fait de continuums totalement disjoints : il avait déjà mis le principe à l’œuvre dans son premier roman Ghostwritten (Ecrits fantômes, L’Olivier). Cartographie des nuages (Cloud Atlas, en vo) date, lui, de 2004, depuis Mitchell a poussé le principe encore plus loin : son prochain roman, non encore sorti aux USA, narre une histoire japonaise à travers six micro romans ou "novellas", composés chacun de 18 chapitres. Neuf par les yeux de « gaijins », étrangers, et neuf par des « nihonjins », nippons. Le procédé n’est néanmoins pas une recette : Number9dreams et Black Swann Green, qui seront certainement traduit en France juste un peu avant que la Lune ne s’écrase sur la Terre, échappent à ce schéma.
Si Mitchell n’aime donc pas faire simple, il ne tombe pas non plus dans l’amphigourique. Ce qui ne l’empêche pas de chantourner sa narration comme un maitre verrier. Et plutôt que de servir une quelconque histoire d’amour, Mitchell se met au service d’une vision. Ca fiche un peu le tournis, d’autant que le Poulidor du Booker Prize – deux fois finaliste pour seulement quatre romans au compteur, bon ratio – voit loin et haut. L’extrême intelligence de Mitchell est finalement de ne pas servir un roman à thèse. On se surprendrait bien à lui baiser les pieds pour ne pas nous avoir resservi le coup de l’humanité qui « court à sa perte si on ne fait rien avant qu’il soit trop tard », de l’uchronie frelatée, de la post-apocalypse postadolescente, de l’amour plus fort que la mort et tutti quanti. Non. Rien de tout cela dans Cartographie des nuages, et pourtant tout y est. À pleurer de maîtrise, de style, de panache. C’est beau comme un concerto, poignant comme un ayre et ample comme une symphonie.

1+1+1+1+1+1+1=6
On saluera au passage le travail du traducteur qui ne doit plus avoir que deux poils sur la caillou pour avoir traduit le patois Morori ou la préciosité du journal de la traversée du Pacifique d'Adam Ewing, deux des protagonistes de Cartographie des nuages. Parmi les six novellas qui composent cet Atlas. L’univers de Mitchell est à la fois pop et élitiste, hétéroclite et dense : de nombreux personnages communs vont et viennent dans ses romans. Luisa Rey, la pasionaria, Thimoty Cavendish, l’éditeur dessalé, pour ne citer qu’eux, apparaissent dans plusieurs de ses opus. « J’ai appris que le langage est aux expériences humaines ce que la spectrographie est à la lumière : chaque mot porte une infinité de micronuances, une généalogie… », a-t-il déclaré au Washington Post.
Plus que l’analogie des poupées russes, pas très satisfaisante dans la mesure où aucune nouvelle ne contient une autre, celle de la lumière s’impose d’elle-même à cette Cartographie des nuages : longueurs d’ondes différentes, opposées, superposées, polarisées pour finalement n’être qu’un rayon de lumière blanche et pure. Pourtant la pyrotechnie stylistique ne rogne jamais la narration, menée très strictement. Malgré les apparences, la prose de Mitchell est nouée de quelques principes métaphysiques plutôt simples mais efficaces, comme la circularité de l’Histoire, le rapport au Savoir. Un peu de Nietzsche, par ci, un peu de Jung par là, pour son utilisation des archétypes. Mitchell cite Italo Calvino pour la structure mais aussi Jared Diamond, l’anthropologue de l’eschatologie connu en France pour son Effondrement. Et la réincarnation… Mais rien de new-age, que les cartésiens se rassurent. Il aime brouiller les pistes : David Mitchell a été également nominé pour le prix Nébula, un des prix les plus renommés pour... la science-fiction. Inclassable, on vous dit. C’est peut-être ça la littérature.

Laurent Simon

Cartographie des nuages
David Mitchell
Ed. L'Olivier
660 p / 23 €
ISBN: 2879294858









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